Les relations internationales sont mortes, vive les Relations Publics !
par Fabien Aufrechter, directeur de Havas Blockchain
OPINION. Si le vingtième siècle fut celui de la Mondialisation, le vingt-et-unième est celui de l’Horizontalisation. Ce phénomène, impulsé par la redéfinition des espaces (réduction des distances, émergence du cyberespace, etc.), correspond à une disruption des codes et des modèles structurant de la géopolitique mondiale. Par Fabien Aufrechter, directeur de Havas Blockchain.
Le phénomène de l’Horizontalisation est paradoxal : il reste évidemment géographique – non, les États ne sont pas morts ! – tout en étant profondément a-géographique puisqu’incluant des dimensions déterritorialisées. Il naît pour ainsi dire avec les réseaux sociaux mais permet d’appréhender sous un nouveau jour des phénomènes finalement aussi « communs » que les flux migratoires, les investissements, les stratégies des acteurs privés, les mouvements religieux, les solidarités transnationales, les mobilisations des sociétés civiles ou encore l’influence d’internet et les médias.
L’avènement des Relations Publics
L’Horizontalisation du monde ne peut, par définition, être appréhendée qu’à l’aide d’une focale déterritorialisée ce qui exclut les analyses géopolitiques et les relations internationales. Le phénomène se place donc, à date, au triangle des Bermudes de la pensée occidentale.
Comprendre ce nouveau modèle, c’est donc adopter une nouvelle focale. Celle-ci existe déjà en tant que discipline opérationnelle mais pas encore en tant que modèle de pensée : il s’agit des Relations Publics (ayant pour vocation à élargir le spectre des relations publiques traditionnelles vers les usages du digital, dont l’image de marque, la réputation, etc.)
Opérationnellement parlant, les Relations Publics sont aux acteurs non-étatiques ce qu’est la diplomatie aux États : un outil de contrôle et donc de puissance reposant sur la présence ou l’influence. En tant que modèle de pensée, elles proposent un paradigme en réseau où les espaces remplacent les territoires. Et où la notion d’individu est au cœur, l’opinion et les publics au centre et la totalité des acteurs – du plus structuré au plus anonyme – intégrés à un monde se définissant par sa complexité.
Les Relations Publics, pour une société des usages ?
Le modèle de société de l’ère des Relations Internationales était Westphalien, confucianiste, vertical. Fruit immédiat de la mondialisation, il continue de proposer un monde organisé autour de marques monopolistiques. C’est le monde selon Amazon, Google, Tencent ou Baidu. Sans interconnections, ce modèle profondément libéral était en quelque sorte « monothéiste » en ce qu’il ne proposait comme élargissements ou comme passerelles entre chaque marques, que la forme juridique et cadenassée de « partenariats ».
En réaction à ce modèle, le nouveau paradigme qui se constitue est le fruit d’une véritable révolution copernicienne. Bien sûr, il n’est aujourd’hui qu’émergent mais sa puissance et son expansion sont sans précédent dans la mesure où pour la première fois, à l’aide d’infrastructures neutres, il propose une confiance et des gouvernances distribuées. Proposant un modèle déterritorialisé, décentralisé et plaçant les usages à son cœur, il constitue une sorte de « polythéisme » qui oppose aux logiques de partenariats celle de la compatibilité inter-usages.
Alors que le modèle monothéiste s’annonce toujours plus menaçant (captation de data, émergence du deep fake, etc), ce Nouveau Monde « polythéiste » se déploie avec d’autant plus de rapidité qu’il se trouve validé et appuyé par les évolutions technologiques (Trustechs, technologies blockchain, etc). Reste désormais aux entreprises de prendre le tournant de cette véritable révolution de la confiance en investissant ce paradigme. Et aux consultants en Relations Publics qui se trouvent, pour la première fois poussés en première ligne d’un monde plus complexe que jamais, de les y accompagner.